La paralysie de l’ONU est particulièrement dramatique pour les Palestiniennes et les Palestiniens de la bande de Gaza. Depuis la cruelle incursion du Hamas il y a plus d’un an, Israël mène une guerre de destruction contre la population civile. Avec l’aide des États-Unis, Israël bombarde Gaza. Le premier ministre israélien Benjamin Netanyahu légitime ces bombardements terroristes par un seul mot: «vengeance». Il arrive même que soient bombardés deux fois de suite et rapidement les mêmes quartiers. Et que soient ainsi tué-e-s les sauveteurs-euses qui cherchent des victimes après les premiers impacts. Un exemple: le bombardement répété du camp de réfugié-e-s de Jabalia en novembre 2023.
Protection
Le 29 décembre 2023, l’Afrique du Sud a porté plainte contre Israël pour non-respect de la convention de l’ONU contre le génocide. En guise de mesures immédiates, la Cour suprême de l’ONU a condamné Israël à garantir la protection de la population civile palestinienne et à assurer l’aide d’urgence à la population civile. Le premier ministre israélien Benjamin Netanyahu a rejeté ces mesures provisoires d’urgence. La plus haute instance judiciaire de l’ONU est totalement impuissante. Peu après la reprise de la guerre, le secrétaire général de l’ONU, António Guterres, a exigé le respect immédiat du droit international humanitaire. Il a condamné la terreur du Hamas, mais a également déclaré que les attaques «ne se sont pas produites en vase clos». Les Palestinien-ne-s souffrent depuis cinquante-six ans d’une «occupation étouffante». Réponse du ministre des Affaires étrangères de l’époque Eli Cohen: «Nous nous battons contre des animaux.» Et d’exiger la démission du secrétaire général de l’ONU. Mais António Guterres est resté en poste.
Espion
Entre-temps, le conflit s’est étendu à toute la région. António Guterres a appelé à la fin de la violence au Proche-Orient. Selon lui, l’évolution de la situation conduit les habitant-e-s de la région tout droit vers l’abîme. En réponse, le gouvernement israélien a déclaré António Guterres persona non grata, une personne indésirable. En droit international, c’est en invoquant ce motif que l’on expulse les espion-ne-s d’un pays.
Honte
Le Parlement israélien a désormais décidé de bannir l’Office de secours et de travaux des Nations unies pour les réfugié-e-s de Palestine dans le Proche-Orient (UNRWA) d’Israël et d’interdire aux autorités israéliennes tout contact avec l’UNRWA. Le ministre des Affaires étrangères Ignazio Cassis a tout de même critiqué cette décision. Selon lui, cette décision est contraire au droit international et menace l’aide humanitaire à la population de Gaza. Mais pour le reste, Cassis refuse toujours de condamner la machine à tuer israélienne. La Convention de Genève et les deux protocoles additionnels qui fondent le droit international humanitaire obligent la Suisse, en tant qu’État dépositaire, à convoquer immédiatement une conférence pour le rétablir en cas de violation du droit international humanitaire. Or, Cassis ne le fait pas. C’est une honte.
Sociologue, ancien rapporteur spécial de l'ONU pour le droit à l'alimentation, Jean Ziegler est aussi auteur de nombreux livres, entre autres: Le capitalisme expliqué à ma petite-fille (en espérant qu'elle en verra la fin), Seuil, 2018, et Lesbos, la honte de l’Europe, Seuil, 2020. Il vient de faire paraître Où est l'espoir?, Seuil 2024.
Paru dans Services Publics n° 14, 29 novembre 2024. Cette chronique a été initialement publiée dans Work, 7 novembre 2024.
Retrouvez les autres billets de Jean Ziegler sur www.ssp-vpod.ch/la-suisse-existe.