Assurance-maladie: passer à l'offensive

de: Christian Dandrès, président du SSP

Relançons le débat pour une caisse publique, unique et sociale!

Eric Roset

En juin 2024, une majorité de votant·e·s a refusé l’initiative du Parti socialiste pour limiter à 10% la part des revenus consacrée aux primes d’assurance-maladie. Ce refus a été suivi par l’annonce de hausses de primes de 6% en moyenne pour 2025. La tendance va certainement se poursuivre en 2026.

Les représentant·e·s des assurances au Parlement fédéral ont déjà présenté leurs propositions. Ils veulent supprimer la solidarité instituée par la LAMal entre jeunes et personnes âgées, avec la proposition Nantermod (PLR). Le Centre veut imposer le Managed Care refusé en 2012 en votation (Hegglin).

Pour contrer ces attaques, il faudra plus que des référendums. Des lancements d’initiatives populaires sont attendus. Gagner une votation à la double majorité est une entreprise difficile. Cela n’est possible qu’en intégrant le plus largement possible les personnels de santé, des prestataires de soins – médecins généralistes par exemple – patient·e·s et assuré·e·s. De même, la santé pose la question de ses déterminants sociaux. Être en bonne santé dépend principalement de l’environnement, du mode de vie ou encore de l’éducation. Les conditions de travail ont un impact décisif, tout comme la dégradation de l’environnement. Thématiser ces enjeux, c’est donner une place aux militant·e·s du climat ou de la grève féministe et, plus généralement, des jeunes générations engagées dans ces luttes.

Une nouvelle initiative doit par ailleurs s’inscrire dans une histoire politique. Pensons notamment à l’initiative du Mouvement populaire des familles (MPF) «Pour une caisse maladie unique et sociale», qui était construite sur ces axes: une caisse unique, une gouvernance intégrant les pouvoirs publics, les prestataires de soins et les assuré·e·s, un financement via des primes fixées selon la capacité économique.

Il n’est pas possible de prévoir des solutions à la crise actuelle sans défendre ces principes démocratiques et sociaux élémentaires.

Au moment où ces lignes sont écrites, aucun projet d’initiative n’a déjà fait l’objet de larges consultations. Plusieurs propositions parlementaires sont cependant en cours de discussion. Elles reposent sur une logique de gel temporaire des primes en vue d’une révision plus profonde du système de financement. Cette logique fait peser une menace sur l’accès aux soins et les conditions de travail des personnels de santé. Sans moyens financiers, face à l’augmentation des charges, le système serait étranglé. Les variables d’ajustement seraient les travailleurs·euses et les patient·e·s (à travers une augmentation de la participation directe des assuré·e·s ou encore la réduction du catalogue des prestations remboursées par l’assurance-maladie obligatoire).

Tout projet d’initiative à caractère social doit intégrer la question du financement. Celui-ci pourrait reprendre le système de l’AVS via une cotisation paritaire [1]. Un basculement du financement vers l’impôt fédéral pose la question de son caractère plus ou moins redistributif (en allant decrescendo de la TVA à l’Impôt fédéral direct).

Concernant la gouvernance, proposer de mettre un terme au pouvoir des caisses-maladie est un axe central qui se situe dans le prolongement de la campagne contre EFAS en automne dernier. Le caractère public d’une caisse n’est pas en lui seul le gage d’un fonctionnement démocratique et respectueux des besoins de la population. Il faut donc prévoir une caisse nationale ou des caisses cantonales gérées paritairement sur le modèle de ce que proposait le MPF en intégrant les personnels de santé.


[1] Pour une projection, voir l’article de Benoit Blanc: https://alencontre.org/suisse/suisse-assurance-maladie-repartir-des-besoins-en-sante-pour-une-alternative-concrete-quantifiee.html