Épuisées, mais toujours mobilisées !

de: Michela Bovolenta, secrétaire centrale SSP

Sous pression au boulot, sous tension à la maison, les femmes continuent de jongler au détriment de l’égalité et de leur santé. Le 14 juin, nous poursuivons notre combat.

Eric Roset

Les 14 juin 2019 et 2023, nous avons élaboré des cahiers de revendications pour ancrer l’égalité sur les lieux de travail. Les employeurs des secteurs publics et subventionnés nous ont globalement boudées et ont poursuivi leurs politiques d’austérité. Même les élues ont fait la sourde oreille. Pendant ce temps, les travailleuses s’épuisent, comme le montre une récente enquête de l’Office fédéral de la statistique (OFS) sur la santé[1]. Les rares dispositions légales qui existent, notamment en matière de protection de la santé des femmes enceintes et accouchées, sont peu ou pas respectées et les parents salariés, en particulier des mères, continuent de jongler au mieux. Pour rendre visible cette réalité, le SSP lance un sondage auquel nous vous invitons à répondre.

Mal au travail

Selon l’OFS, le stress au travail est en forte progression depuis 2012 pour tout le monde, mais en particulier pour les femmes. Une travailleuse sur quatre est épuisée émotionnellement et une sur deux est exposée à au moins trois catégories de risques psychosociaux. Pour la première fois, les femmes sont davantage concernées que les hommes par les risques psychosociaux. Un palmarès, dont on se serait volontiers passées. Parmi les secteurs les plus exposés au cumul des risques psychiques et physiques, on trouve le secteur de la santé et du social, qui occupe un quart des femmes actives professionnellement.

Pressées comme des citrons

Dans les métiers de la santé et de l’accueil des enfants, 59% des travailleuses sont soumises à des positions douloureuses, comme soulever ou déplacer des personnes. À cela s’ajoutent des exigences émotionnelles importantes. Elles sont 31% à ressentir du stress, alors que cette part n'était que de 18% il y a dix ans. Ces résultats confirment ce que nous observons sur le terrain: les conditions de travail se sont durcies. Depuis trente ans, les pouvoirs publics alignent les programmes d’austérité et imposent des logiques de rentabilité. Moins d’effectifs, des rythmes de travail accrus, des salaires trop bas, une perte de sens du travail. Pressées comme des citrons, de plus en plus de travailleuses s’épuisent, tombent malades, craquent et quittent un métier qu’elles disent aimer, mais pas comme ça.

Plus de harcèlement

Le nombre de victimes de harcèlement sexuel a plus que doublé, passant de 0,6% en 2012 à 1,7% en 2022. Le taux monte à 4,1% pour les femmes entre 15 et 29 ans. Ce taux élevé peut s’expliquer en partie par une prise de conscience de ses droits, que la jeune génération a acquis grâce aux mouvements comme #MeToo et les grèves féministes. Il n’en demeure pas moins que le harcèlement sexuel est toléré et banalisé par les employeurs qui ne font rien pour mettre fin à ce fléau. Aussi, le machisme reste profondément ancré dans la société: la libération de la parole est un début, mais nous sommes loin d’avoir éradiqué la violence de genre dans la société.

Double journée

Surchargées au travail, les femmes ne sont pas pour autant déchargées dans leurs tâches domestiques et éducatives, si bien qu’elles continuent d’assurer la double journée et la charge mentale, mettant en danger leur santé. Si les hommes ont quelque peu augmenté leur participation aux travaux domestiques et à la prise en charge des enfants, cela ne suffit pas à compenser le surcroît de travail professionnel et familial dont souffrent les femmes. Car, en Suisse, le temps de travail est trop long, les mesures dites de conciliation sont trop faibles et les places en structures d’accueil trop rares. Face à ces obstacles, l’égalité, qui peine déjà à percer le plafond de verre, se heurte au «plafond de mère» et les femmes sont enfermées dans des emplois à temps partiel, souvent imposés par l’employeur, qui les condamnent à des salaires bas et à des retraites de misère.

Nos revendications

Ce tableau sombre, nous renforce dans notre détermination à lutter pour nos revendications, qui constituent un programme cohérent pour l’égalité. Celles-ci portent sur quatre axes principaux, qui sont la revalorisation des salaires dans les métiers féminins, la réduction du temps de travail, la mise en place de véritables mesures de conciliation, l’intensification de la lutte contre le harcèlement sexuel et toutes les formes de violences sexistes et sexuelles. Le 14 juin, restons mobilisées et participons aux actions et manifestations qui auront lieu dans toute la Suisse romande.


[1] Enquête suisse sur la santé, Conditions de travail et état de santé, entre 2012 et 2022, OFS, 2024.