En avant pour une 13e rente! [1]
La campagne de votation sur les retraites bat son plein. Notre initiative pour une 13e rente cartonne. Selon le sondage de Tamedia[2], 71% de la population voterait oui. En Suisse romande, le oui atteint 80%. Avec 67% d’avis favorables, les prévisions sont aussi bonnes pour la Suisse alémanique. Le oui dépasse largement le camp de la gauche, puisque 60% de l’électorat UDC et du Centre s’expriment à l’heure actuelle en faveur de la 13e rente. Ces résultats ont de quoi booster notre campagne, car les chances de gagner sont réelles. Pourtant, il ne faut rien lâcher. C’est maintenant que les arguments de la droite vont se déployer. Leur stratégie de toujours? Peindre le diable sur la muraille en matière de financement de l’AVS et menacer de nous faire payer le prix en cas de oui, comme l’a fait la conseillère fédérale Keller-Sutter en annonçant une hausse d’impôts. À cela s’ajoutent des arguments comme celui de l’arrosoir ou des jeunes qui payent pour les vieux. Répondre à ces arguments est essentiel pour consolider le oui dans les urnes.
Les finances de l’AVS vont bien
En Suisse, on trouve en un tour de main 109 milliards de francs pour sauver les banques, et la majorité du parlement vote allégrement 32 milliards de francs supplémentaires pour l’Armée. Mais lorsqu’il s’agit de l’AVS, il n’y a plus un radis! Or force est de constater que l’AVS va bien. Tous les scénarios catastrophes en matière de finances de l’AVS se sont révélés faux. Depuis sa mise en place en 1948, la fortune de l’AVS n’a fait que croître: aujourd’hui, le fonds de l’AVS cumule près de 50 milliards de francs de fortune. Les impôts n’augmenteront pas à cause de l’AVS. Selon les prévisions officielles (pourtant systématiquement pessimistes), en 2026, l’AVS réalisera un excédent de 3,5 milliards de francs. La 13e rente peut être financée et, au besoin, il suffirait d’augmenter les cotisations paritaires de 0,4% pour les salarié·e·s et autant pour les employeurs.
Une 13e rente nécessaire
La 13e rente est une mesure juste et simple pour augmenter le pouvoir d’achat des retraité·e·s, qui recevraient, sans démarches ni justificatifs, un supplément annuel correspondant à leur rente AVS mensuelle, soit en moyenne 1800 francs. L’initiative précise que le droit aux prestations complémentaires ne serait pas réduit pour celles et ceux qui les perçoivent. Pour la majorité des retraité·e·s, en particulier pour les femmes dont un quart n’a que l’AVS pour vivre, ce montant est loin d’être négligeable. Certes, la 13e rente ne permettra toujours pas de répondre au mandat constitutionnel qui dit que l’AVS doit «couvrir les besoins vitaux de manière appropriée». Et l’initiative ne résoudra pas la question des inégalités sociales et de genre. Mais une 13e rente soulagerait le porte-monnaie de la majorité des retraité·e·s qui ont subi, comme tout le monde, la hausse des prix, des loyers et des primes de l’assurance-maladie. Cette réalité est la base du large soutien à la 13e rente.
Un plus pour tout le monde
L’immense majorité des retraité·e·s profiterait de la 13e rente, ce qui n’a rien à voir avec une prétendue politique de l’arrosoir. Par cet argument, la droite prétend vouloir aider celles et ceux qui en ont vraiment besoin, alors qu’elle refuse toujours toute mesure sociale. Surtout, l’AVS est une assurance sociale, dont le principe de base est la solidarité: entre les générations, puisque les jeunes ne sont finalement que les retraité·e·s de demain, et entre les bas et les hauts revenus, puisque tout le monde paye les cotisations sur l’entier de son salaire et tout le monde reçoit une rente, mais plafonnée. L’apport financier des très riches à l’AVS est supérieur à ce qu’ils reçoivent en termes de rentes et c’est la principale raison de leur opposition idéologique à l’AVS. Ils préfèrent des systèmes comme le 2e ou 3e pilier, fondés sur l’épargne individuelle et constituant un marché intéressant pour leurs investissements.
Un signal politique fort
Dans le contexte politique actuel, caractérisé par l’échec de justesse du référendum contre AVS 21 et le vote important à venir sur la LPP 21, une victoire sur la 13e rente constituerait un signal politique fort pour mettre un cran d’arrêt aux velléités destructrices de la droite en matière de retraites et d’assurances sociales notamment le tout nouveau projet du Conseil fédéral qui vise la suppression de la rente de veuve ayant élevé des enfants, au lieu de l’élargir aux veufs. Elle pourrait amorcer un changement en faveur d’un renforcement de l’AVS, seul pilier universel, solidaire et égalitaire.
Travailler jusqu’au tombeau? NON, merci
L’initiative «Pour une prévoyance sûre et pérenne» aussi dite initiative «des rentes» porte mal son nom, car en réalité son seul but est de poursuivre la bataille que la droite mène depuis trente ans pour imposer une augmentation de l’âge de la retraite. Certain·e·s se souviennent du tollé qu’avait soulevé l’idée de la retraite à 67 ans, lancée par Pascal Couchepin, alors conseiller fédéral radical, sur l’île St-Pierre en 2003. La droite poursuit inlassablement et avec beaucoup de moyens ce projet. Ainsi, il ne faut pas la prendre à la légère, bien que les chances de succès de cette initiative soient maigres, puisque seules 35% des personnes ayant répondu au sondage de Tamedia y sont favorables.
AVS 21 vient à peine d’entrer en vigueur[3] au début de l’année que nous sommes déjà confronté·e·s à une nouvelle attaque contre nos retraites. D’ailleurs, nous l’avions annoncé: l’augmentation de l’âge de la retraite des femmes ne pouvait qu’ouvrir la voie à une hausse généralisée de l’âge de la retraite. La droite nous a accusé·e·s de mentir. Or l’initiative des rentes nous donne raison. Nous avions aussi raison de dénoncer les vaines promesses de la droite en matière d’égalité et d’amélioration des rentes des femmes, qui ont été vite oubliées. En fait, la seule mesure pour améliorer la situation des retraitées est bel et bien la 13e rente.
Dans le détail, l’initiative des rentes veut imposer d’ici à 2033 une augmentation de l’âge de la retraite à 66 ans, puis elle veut lier l’évolution de l’âge de la retraite à l’espérance de vie, ce qui d’après le comité d’initiative porterait l’âge de la retraite à 67 ans et 7 mois en 2050. Il s’agirait d’un mécanisme automatique qui priverait le peuple du droit de vote en la matière. L’enjeu est donc aussi démocratique.
L'initiative des Jeunes libéraux-radicaux est antisociale et injuste, car elle pénaliserait les travailleuses et les travailleurs qui ont des conditions de travail pénibles et dont les salaires bas ne leur permettent pas de se payer une retraite anticipée, contrairement aux classes aisées.
Pas d’économie sur le dos des veuves et des veufs!
En octobre 2022, un jugement de la Cour européenne des droits de l’homme de Strasbourg a rendu un arrêt qui oblige la Suisse à mettre fin à l’inégalité de traitement entre les veuves et les veufs. L’affaire est celle d’un veuf ressortissant du canton d’Appenzell Rhodes-Extérieures qui a fait recours contre la suppression de sa rente de veuf une fois son dernier enfant ayant atteint l’âge de 18 ans, alors qu’une veuve dans la même situation continue de toucher une rente. Cette inégalité de traitement est effectivement injuste: au-delà du chagrin, le parent qui assume seul, parce que veuf, l’éducation et le soin à ses enfants, ne peut la plupart du temps pas consacrer le même temps et la même énergie à son métier. Son évolution professionnelle s’en voit modifiée et ce n’est pas d’un coup de baguette magique que, lorsque son dernier enfant a 18 ans, il peut «rattraper le temps» d’avant.
Aujourd’hui, le jugement de Strasbourg est appliqué dans le sens positif: la rente de veuf n’est plus supprimée une fois que le dernier enfant a 18 ans. L’égalité est donc appliquée en faveur des pères qui ont désormais les mêmes prestations que les mères.
Mais le Conseil fédéral n’est pas content et dans le cadre des mesures d’économie pour la Confédération, décidées en mars 2023, il a fixé l’objectif d’épargner plus de 700 millions en limitant les conditions d’octroi des rentes de survivant·e·s. Cependant, aucune modification dans la rente de survivant·e de conseillers·ères fédéraux·ales n’est prévue: «La règle doit en outre continuer à s’appliquer: lorsqu’une conseillère fédérale ou un ancien conseiller fédéral décède, son partenaire reçoit une rente de survivant d’environ 142 000 francs par an, que la personne ait des enfants ou non. La seule condition est que ‘le mariage avec le magistrat décédé ait duré au moins deux ans[4]». C’est une véritable honte que de vouloir faire des économies sur le dos des veuves, des veufs et des orphelin·e·s. D’ores et déjà, nous nous engageons pour combattre une telle réforme!
[1] Pour plus d’informations sur cette campagne et commander du matériel, rendez-vous sur www.ssp-vpod.ch/13e-rente
[2] Sondage Tamedia, publié le 17 janvier 2024.
[3] Le SSP a publié un Guide sur les modifications apportées par AVS 21, qui ne concerne pas uniquement les femmes de la génération transitoire, mais tou·te·s les assuré·e·s. À commander auprès de ou à consulter sur notre site: https://ssp-vpod.ch/news/2023/avs-21-quels-effets-sur-ma-retraite/
[4] 24 heures, 4 janvier 2024.