Selon ce discours, largement relayé par la presse, les femmes ne se seraient jamais aussi bien portées. Leurs arguments: si le patriarcat existait vraiment, les femmes ne pourraient pas être conseillères fédérales, ni diriger des entreprises[1]; la différence salariale entre hommes et femmes n’équivaudrait pas à une discrimination[2]; dans ce contexte, une étude de l’Université de Zurich a été montée en épingle par des médias affirmant de manière polémique que « la plupart des étudiantes préfèrent un homme qui réussit plutôt que de faire carrière elles-mêmes ».
À quelques jours du 14 juin, nous dénonçons cette offensive idéologique menée par le patronat et ses alliés. Bien vivant, le patriarcat prend aujourd’hui encore trois formes principales: l’exploitation, la domination et l’oppression – que l’on peut illustrer par le différentiel de salaires, le plafond de verre et les violences.
L’ensemble du système social et économique capitaliste repose sur la prise en charge gratuite par les femmes du travail domestique, éducatif et de soins: en Suisse, 78% des mères ayant des enfants de moins de 4 ans travaillent à temps partiel, contre seulement 15,5% des pères. Le revenu des femmes, perçu pour toutes les heures de travail accomplies entre 15 à 64 ans, est inférieur de 43,2% à celui des hommes[3]. Une travailleuse sur quatre touche seulement 2 500 francs par mois ou moins. Plus que l’inégalité à fonction égale, c’est l’absence de reconnaissance des compétences et de la pénibilité des métiers essentiellement exercés par les femmes qui est en cause.
S’ajoute à la dépendance économique l’oppression, qui se caractérise par un continuum de violences sexistes et sexuelles subies par les femmes et les minorités de genre au travail, à la maison et dans les espaces publics. Ces violences sont l’un des mécanismes cruciaux par lesquels les femmes sont maintenues dans une position de subordination. Selon l’OFS, 70% des victimes de violences domestiques sont encore aujourd’hui des femmes. Leur forme la plus dramatique sont les féminicides. Or en quelques jours, deux femmes viennent d’être assassinées à Lausanne et à Vevey par leurs conjoints ! Notre colère est immense.
La grève féministe est donc hautement nécessaire. Et nous sommes des milliers à nous organiser en vue de cette échéance! Le 14 juin prochain, arrêtons collectivement le travail, rémunéré ou non, partout où c’est possible. Chaque forme de contestation compte: port du badge, débrayage de 15 minutes à 15h24 pour protester face aux inégalités salariales, arrêt de travail complet toute la journée, participation aux manifestations massives qui se préparent dans toute la Suisse.
Faisons de cette échéance une occasion de consolider notre organisation collective. Car la lutte sera longue !
[1] NZZ, 19 mai 2023.
[2] NZZ, 30 janvier 2023.
[3] https://www.admin.ch/gov/fr/accueil/documentation/communiques.msg-id-90256.html