Pandémie, pénurie et petits pas

de: Beatriz Rosende, secrétaire centrale SSP - Secteur santé

La pénurie de personnel est désormais généralisée dans le secteur santé. Il a fallu des mobilisations et des actions plus ou moins intenses pour obtenir quelques succès. La mobilisation continue, avec une action de protestation le 26 novembre prochain!

Pandémie, pénurie et petits pas
Souvent, nous avons rappelé l’espoir des personnels de santé en tout début de pandémie : avoir été en première ligne allait permettre de les valoriser de manière presque automatique. Rester disponibles et résister malgré le manque de protections et les incertitudes des autorités sanitaires était (presque) vécu comme un sacrifice. Après les applaudissements, de belles récompenses ? Puis les premières revendications syndicales pour une prime Covid ont vite ramené à la dure réalité : non, le dévouement ne serait pas forcément récompensé automatiquement. Il a fallu des mobilisations et des actions plus ou moins intenses, pour obtenir quelques succès, tant pour la prime Covid que pour d’autres améliorations.

Petits pas positifs
S’habiller avec une tenue spéciale pour travailler fait partie du temps de travail selon la Loi sur le travail (loi obligatoire dans la plupart des institutions de santé). Malgré cela, les employeurs refusaient encore avec obstination de se plier à cette obligation. Depuis le passage de la pandémie, le temps d’habillage et déshabillage compte comme temps de travail dans de très nombreuses institutions grâce au SSP : Hôpitaux publics du Valais, HFR à Fribourg, hôpital de la Riviera-Chablais, hôpitaux régionaux et la plupart des EMS vaudois, secteur santé parapublique défini par la CCT santé 21 à Neuchâtel, soins à domicile IMAD à Genève. Restent dans le camp des réfractaires : les HUG, à Genève, le CHUV dans le canton de Vaud (qui se réfugie derrière son statut particulier qui fait que la Loi sur le travail ne s’applique pas dans son intégralité) et l’hôpital du Jura qui entre dans une phase test. Ailleurs en Suisse, ce droit se concrétise lentement mais sûrement.

Autres petites et moyennes améliorations
Les infirmiers·ères spécialisé·e·s (anesthésie, soins intensifs et urgences) de l’HFR à Fribourg ont obtenu après une mobilisation une revalorisation salariale.

Dans le canton de Vaud, le personnel s’est mobilisé dans le secteur parapublic pour des augmentations salariales avec succès, en particulier pour les salaires minimaux. Tandis qu’au CHUV, les congés maternité sont désormais systématiquement et automatiquement remplacés. Ce n’est pas rien sachant que les absences non remplacées dans la santé provoquent régulièrement des surcharges considérables dans les équipes et de graves épuisements.

En Valais, une prime de CHF 1000.- par année a été promise aux soignant·e·s de l’hôpital et des EMS. Geste du canton apprécié qui laisse encore de côté toutes les professions non considérées comme soignantes, tandis que débutent des négociations pour encadrer le secteur des EMS avec une CCT.

A Neuchâtel, les indemnités pour le travail de nuit et du weekend sont enfin soumises à la LPP depuis début 2022. Ce n’était pas le cas pendant des années. Conséquence : les rentes LPP étaient impactées de manière significative. Dans ce canton, dès la 45e heures hebdomadaire, un supplément de salaire de 25 % est dû.

A Bâle, les indemnités pour le travail de nuit passent de 20% à 30% et de nouvelles indemnités sont versées pour les remplacements acceptés dans un délai de 24 heures. Dans ce canton, une clinique a introduit une durée du travail de 39,5 heures au lieu des 42 heures précédemment sans perte de salaire.

A Zurich, des revalorisations salariales sont intervenues dans les hôpitaux de la Ville depuis août 2022. Et à l’hôpital de Wetzikon, de juin 2022 à décembre 2023, la durée du travail a été réduite de 10 % pour le personnel travaillant en horaires d’équipe sans perte salariale.

Le personnel des hôpitaux de Schaffhouse reçoit lui aussi désormais des primes pour des remplacements de dernière minute.

Ailleurs, « grâce » à la pandémie des dégradations ont été évitées. A Neuchâtel, les employeurs menaçaient de dénoncer la CCT, en Valais, l’HVS a annoncé une nouvelle grille salariale inacceptable pour le personnel et l’a retirée assez rapidement après une série d’assemblées du personnel.

La pénurie de personnel est désormais généralisée dans le secteur santé ; elle provoque des épuisements, des départs et un tournus du personnel difficile à encadrer dans les équipes. Ces pas pourraient alors sembler très insignifiants au regard des besoins et des attentes du personnel ; ils montrent que les moyens pour mieux faire dépendent des mobilisations. Rien de très nouveau, mais les conditions sont réunies pour réclamer plus encore.


Le 26 novembre 2022, les membres de l’Alliance du personnel de la santé seront à nouveau sur la place fédérale dès 14h00 pour une action de protestation!